J’ai un acheté un pantalon chino rose sur un coup de cœur l’été dernier, malgré mon âge (mais vous savez que les personnes d’un certain âge paraissent mieux avec des couleurs claires?). Il était joli, d’un vieux rose clair et la taille était parfaite et le tissu très agréable. Mais quand on achète des choses sur un coup de cœur, on n’a pas toujours dans la garde-robe des vêtements qui vont avec. Je trouvais que les hauts que je portais avec le pantalon ne se mariaient pas très bien et me suis dit : je vais faire un pull qui lui va parfaitement !
Il doit être d’une couleur naturelle, en coton pour l’été, idéalement slubby (de grosseur inégale), mais avec un peu de laine quand même pour la tenue… J’avais une idée assez précise de la laine, et la recherche sur l’internet n’était pas très fructueuse. J’ai trouvé un fil pour tissage presque parfait, mais il était américain et onéreux, et quand on ajoute le frais de port, c’était déraisonnable (et si le fil ne me plaît pas ?) J’ai eu l’impression qu’il n’y a pas beaucoup de références en coton en Europe, peut-être parce que l’on ne la cultive pas ici.
Mais un jour, je me suis souvenue que La Droguerie avait une laine recyclée et suis allée à la boutique de ma ville. En attendant mon tour d’être servie, j’ai vu une laine slubby d’un coloris naturel. L’étiquette dit qu’elle est composée de la soie bourrette, du lin et de la laine. Le toucher est à la fois doux et rustique… Même si la matière principale n’est pas du coton, ce ne serait pas la laine que je recherchais ?
A mon tour, j’ai posé des questions sur cette laine. L’échantillon était plus gros que je pensais (17 mailles pour 10 cm). Je me demandais si c’était la fin de série car il n’y avait qu’un coloris mais ce n’était pas le cas, et elle a été toujours disponible uniquement dans ce « coloris » naturel. Et comme la laine pour laquelle j’ai fait le déplacement était beaucoup plus foncée que sur l’écran d’un PC, j’ai décidé d’essayer cette nouvelle découverte.
J’ai « googeulisée » soie bourette à la maison : c’est de la soie faite à partir du déchet de cocon de ver à soie qui reste après le filage du long fil (vous savez que le cocon de ver à soie est fait à partir d’un seul fil que le ver crache). La totalité de cocon ne peut pas être utilisé pour le fil de qualité suprême destiné au tissage, mais le reste peut être transformé en soie de plusieurs qualités, dont « bourrette ». Il paraît que tout est utilisé dans le filage de la soie et il n’y pas de déchet, c’est une matière très écologique !
La laine contient donc 45% de soie bourrette, 35% de lin et 20% de laine. Le fil est constitué de plusieurs brins fins de lin (devant) et de plusieurs brins de soie/laine.
Tricoté, les brins de lin ajoutent de la brillance et de l’élégance à ce mélange un peu rustique de soie et de laine.
La fiche technique de la laine dit que son nom Provençale fait référence à la tradition de sériciculture en Provence. En tant qu’une Asiatique, je pensais que l’Europe importait depuis toujours la soie produite en Asie (Chine, Indes et Japon !) par la Route de la soie. Et en faisant une petite recherche, j’ai découvert qu’un agronome français du nom de Olivier de Serres a calculé le coût annuel d’imporation de la soie vers la France et a dit au Roi, « hé mon Roi, c’est bien trop cher, vaut mieux la produire nous-même ! » mais peut-être pas en ces termes. Des mûriers à soie ont été alors plantés dans le Midi et la sériciculture a débuté en France. La production a été au plus haut niveau au milieu du XIX siècle mais a decliné après cette date à cause d’une faible compétitivité de la soie française (trop cher) et de l’invention des matières synthétiques. La sériculture en France est confidentielle de nos jours.
Et la laine m’a parue d’autant plus intéressante qu’elle allie à la soie bourrette le lin et la laine, les deux matières traditionelles européennes aussi (même s’il n’y a pas de mentions sur le pays d’origine des matières), et je l’ai acheté en cône (tada).
Il faut dire que la cône n’était pas très « mobile » mais a été adaptée à ce projet car le pull se porte sur les deux faces et je n’ai pas eu beaucoup de fils à rentrer 🙂
Je dois ajouter un petit mot sur cette laine car vous pouvez être intrigué.e. Très mystérieusement, elle n’est pas référencée sur la boutique en ligne de la droguerie et j’ai bien peur qu’elle ne soit disponible que dans les boutiques. Et c’est pour cette raison que j’ai hésité à « patronner » ce pull.
Quelques tricoteuses étaint pourtant enthousiastes lorsque j’ai posté les photos et j’ai finalement rédigé les explications. Si vous ne pouvez pas mettre la main sur cette laine, vous pouvez quand même le tricoter avec une laine de catégorie « Aran » (se tricote en n° 4,5 – 5,5) pour cet hiver.
Je vais lancer un avis de test très prochainement, avec des photos du pull porté avec mon chino rose 🙂
Un avis sur « Provençale de la droguerie »