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Laine britannique – guide d’achat de la laine locale

Dans un récent billet où je parlais d’une laine très locale, j’ai « déclaré » que j’essayais d’acheter des fils européens. Ce principe est souvent ébranlé devant les magnifiques photos de laine teinte à la main des réseaux sociaux, et je me permets de temps en temps de ne pas l’observer car je ne suis pas du genre « radicale », mais j’essaie quand même de le tenir le plus souvent possible. Et j’ai été confrontée récemment à un dilemme auquel je ne m’attendais pas.

Ceci est arrivé quand j’ai voulu acheter une laine britannique.
Vous les amoureuses de laine doivent savoir que les yeux des tricoteuses du monde entier sont braqués en ce moment sur le Royaume-Uni. Il faut dire que ce pays a une longue tradition de l’insdustrie textile, et est également le pays qui a développé le plus de races ovines au monde.
Mais ce regain d’intérêt date presque d’hier, plus exactement de l’année dernière. En effet, la célèbre créatrice anglaise Kate Davies a lancé sa propre marque de laine Buachaille, fabriquée en Ecosse à partir de la laine de moutons récoltée en Ecosse. Elle a été suivie par Ysolda Teague, jeune mais aussi talentueuse créatrice anglaise, qui a sorti cette année sa Blend No.1, et Rachel Atkinson qui commercialise la laine fabriquée à partir de la toison des moutons de son père, qui était acheté jusque-là par un organisme publique à un prix quasi nul – sa marque s’appelle à juste titre Daughter of a shephered, fille d’un berger. Tout ceci est en quelque sorte l’aboutissement du mouvement « acheter local » et la prise de conscience des Britanniques sur leur héritage qui était bien en péril. Nous pouvons ajouter que Knit British – love local wool, un podcast tenu par Louise Scollay qui fait le tour d’horizon de la laine britannique, contribue à ce mouvement.

Cette « social-médiatisation » de la laine britannique a attiré les yeux par ricochet sur les filatures qui subsistaient tant bien que mal après le déclin de l’industrie textile, et Blacker Yarns en est un exemple parmi d’autres qui méritent toutes notre attention.
Cette marque a été créée par Sue Blacker, présidente de The Natural Fibre Company qui produit des fils à partir de la toison récolté auprès des éleveurs locaux. Sa marque éponyme commercialise également des fils britanniques – et je reviens ici à nos moutons 😉

Ses fils sont britanniques, issus de toison de moutons britanniques et fabriqués au R-U. Mais le R-U, qu’est-ce qui signifie au juste ?
Le R-U n’est pas seulement l’Île Grand Bretagne et l’Irlande du nord. Le fil que j’ai voulu acheter est un mélange de la laine et du lin, et la laine vient des Îles de Falkland. Et est-ce que vous sauriez les situer ? Ils font partie des territoires britanniques d’outre-mer, et se trouvent très, très loin de l’Europe, au large de l’Argentine (vous vous souvenez peut-être de la guerre des Falkland) et quasiment à la latitude de la Terre de feu (c’est plus loin que l’Uruguay de Malabrigo !), la pointe australe du continent d’Amérique.
Si vous êtes Britannique, l’achat de cette laine se présente comme un acte de soutien à l’économie nationale. C’est comme si vous achetez un produit de DOM-TOM, qui n’est pas très « local » (pour les métropolitains), mais belle et bien français. Et pour une Japonaise qui habite en France, cette laine est tout simplement pas locale, donc pas très écologique au niveau empreinte carbone. D’où mon dilemme.

Après moult hésitations, j’ai finalement acheté la laine en question. J’avoue que ma curiosité l’a emporté.
lyonesse-moonstone-unwrapped
Admirez cet alignement régulier des pelotes!

Elle s’appelle Lyonesse DK. C’est une laine peignée, qui est rare chez Blacker Yarns dont 90% est la laine cardée. Et conformément à mon attente, cette combinaison des matières peu courante est intéressante : la laine adoucit le toucher qui peut être parfois dur du lin, tandis que celui-ci donne une brillance discrète au fil. J’en suis plutôt contente (je parlerai de ma réserve dans un prochain post sur le pull que j’ai fait avec).

Je clos ce billet, en dressant une sorte de guide d’achat de la laine locale et il y beaucoup d’éléments qui entrent en jeux.
D’abord la marque. Si la marque est « nationale », il y a une chance qu’elle fabrique ses fils dans le pays, comme Bergère de France ou Fonty qui arbore Made in France ou Creuse. Mais ce n’est pas toujours le ca : la célèbre marque anglaise Rowan par example fabrique leurs laines un peu partout dans le monde, mais pas en Angleterre.
Et avant d’arriver au stade de la laine prête à filer, la laine de moutons passe par plusieurs étapes, à partir de la tonte, lavage, cardage, peignage, et peu de structures sont capables d’assurer seuls toutes les étapes. Il est tout à fait possible que la laine tondue à un endroit va être envoyée dans une autre région voire un autre pays pour être préparée (c’est le cas de ma laine locale).
Enfin, il y a la provenance de la matière première, et c’est l’aspect le plus obscur de la fabrication des fils, car comme la mention d’origine n’est pas obligatoire, nombreux fabricants gardent le silence. Et vu la production mondiale de la laine, votre fil d’une marque française made in France est fabriquée à partir de la laine australienne ou chinoise. Je ne dis pas qu’il faut savoir si c’est la laine qui a poussé sur le dos de Shawn, mais on peut être vigilants sur ce point. La transparence de Blacker Yarns est donc déjà louable.

Je vous remercie de votre longue attention et je serai ravie si vous faites attention à ces points lors de votre prochain achat de laine 🙂

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